Le franglais nous précipite chaque jour vers des abîmes d’incompréhension. Des néologismes que mêmes les plus anglo-saxons des yankees ne comprennent pas encore deviennent chez nous des concepts tout aussi incompréhensibles mais pourtant déjà éculés.
De quoi parle-je ? Que vous suggèrent ces expressions : post-truth, fake news, alternative facts ? Ne sont-elles pas cool et freaky ?
En français : What am I speaking about ? What do you think of these expressions : mensonge débusqué, propagande mensongère, mensonge éhonté ? Aren’t they fraîches and flippantes ?
Eh oui, l’idée même que le mensonge existe est vielle comme le monde, en particulier dans la vie politique mais pas seulement. Alors de quoi veut-on parler, qu’y-a-t-il de nouveau qu’il faille passer par l’anglais pour s’intéresser à l’art d’induire en erreur ? Sommes-nous tous des Monsieur Jourdain ignorant que nous pratiquions et continuons de pratiquer la prose, mensongère bien sûre ?
Les Américains sont choqués et les Britanniques not amused que leurs têtes de hit-parade soient des menteurs. Tous, sauf Henry Kissinger qui en a vécu d’autres, supposaient jusqu’à hier soir que ce péché était une exclusivité d’autres démons, extrémistes de tous bords. Puis est venue la pluie de la nuit et il se sont réveillés mouillés jusqu’à l’os. Les pauvres ingénus participaient au démon. Il fallait bien que cela procédât d’un sombre complot, des Russes, Chinois ou Martiens, peu importe, mais en tous cas de l’extérieur.
Le nez du président Nixon s’allongeait comme celui de Pinocchio, les pratiques sexuelles de Clinton ne l’étaient pas faute de pénétration, le Secrétaire d’État Powell était visiblement plus qu’embarrassé de devoir présenter des « preuves » de l’existence d’armes de destruction massives en Irak en présentant à l’ONU des schémas si enfantins que la revue de Mickey n’aurait jamais osé les publier. On n’avait pas pardonné mais heureusement oublié.
Ce qui a changé est l’immédiateté de la révélation. Il n’est plus nécessaire de nommer un procureur spécial pour enquêter durant des mois ou années ; par la grâce d’internet le retour de flamme est presque instantané et, immédiateté élevée au carré, au mensonge se substitue une litanie d’autres mensonges qui à leur tour devront être débusqués. Cela évite très commodément de devoir parler du fond des problèmes. On vote pour le Brexit en toute harmonie avec soi-même et son grand humanisme pour constater que la délicieuse haine de l’étranger et des institutions européennes avait été attisée par des discours mensongers dont les perpétrateurs durent se rétracter au lendemain du vote. Le pas vu pas pris pas coupable ne fonctionne plus. Les Américains, qui cultivent la délation depuis avant le Maccarthysme et récompensent grassement les redzipèteurs (whistleblower) et autre repentis maffieux, sont maintenant dépassés par les hackers des fuites du Wiki.
Alors il y a une plutôt bonne nouvelle dans cet emballement suspicieux et décérébré : il vaut mieux ne pas mentir, c’est vilain et on s’y fait prendre.
Deuxième recommandation, utilisez un vocabulaire plus simple et moins simpliste, please !
Et enfin, comme le préconisait le Président Reagan : trust but verify !
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