Transition énergétique : révolution ou décadence ?

Le néo-soviétisme en marche

En Suisse comme dans plusieurs pays du monde industrialisé la mode est à la transition énergétique. Il s’agit de sortir du nucléaire, de réduire ou même éliminer les émissions de gaz carbonique afin de prévenir les malheurs climatiques, et de se rendre indépendant des producteurs de ressources pétrolières. Pour y arriver il est prévu d’installer des technologies de production d’énergie renouvelable et de mettre en place des programmes d’économie. En Suisse où presque aucune électricité n’est produite thermiquement ­– sauf là où l’on combine la production de vapeur de chauffage avec celle du courant – il s’agit avant tout de gérer la sortie du nucléaire qui représente 40% de la consommation et de faire face au marché européen qui, ces temps, a des capacités excédentaires. Mais si l’on désire chauffer les maisons avec des pompes à chaleur plutôt qu’avec du mazout et conduire des véhicules tout électriques, il faudra augmenter les capacités de production, même si par ailleurs quelques économies seront réalisées.

Pour ma part, hormis l’indépendance vis-à-vis de producteurs d’hydrocarbures, je n’ai pas encore été convaincu du bien-fondé de ces objectifs. Le nucléaire est une énergie qui peut être améliorée et qui ne pose pas de problèmes à court terme, sinon il serait impératif de l’arrêter immédiatement. Les effets négatif sur le climat causés par l’augmentation de la concentration  atmosphérique de CO2 restent hypothétiques et dépendent de modèles et scénarii mal validés.

Mais qu’importe, la vraie vérité est en chemin et malheur à celui qui la mettrait en doute. Pourtant on peut quand même se poser la question si ce nouveau dogme nous mène à un bond en avant d’ordre révolutionnaire ou à une régression, voire à une décadence.

Dès le début de l’ère industrielle chaque progrès technologique a conduit au mieux-être des peuples. Et quand j’écris mieux-être il faut bien réaliser que je ne parle pas de bonheur qui, lui, est un état d’esprit de chaque personne. Ceci s’est exprimé par une réduction de la charge horaire et physique du travail et par l’accès à des activités jusqu’alors considérées comme impossibles et donc impensables. S’ils renaissaient aujourd’hui le tailleur de pierre et la lessiveuse du XIXème siècle constateraient de réels progrès, un mot qui a du sens. L’impossible est devenu possible : la mobilité est planétaire, l’accès et l’échange d’information sont quasiment immédiats, la santé et l’espérance de vie n’ont jamais été aussi bons. Il faut être de mauvaise foi pour ne pas reconnaître cela. Bien sûr, par la mise en place de technologies à de très grandes échelles, des conséquences non désirées deviennent significatives telles les pollutions de l’air, des eaux et du sol, ou les accidents ; d’autres technologies, des investissements et des emplois ont été nécessaires pour gérer cela aussi. Et aussi le mal est devenu plus facile à faire, entraînant des conséquences plus dramatiques : désinformation, guerres, terrorisme, associations de malfaiteurs ; ça, c’est le mieux-être des méchants efficaces.

Mais si l’on prend quel qu’exemple que ce soit dans l’histoire technique on y constate toujours une réduction des coûts, en labeur et en monnaie, associée à une appréciation du résultat par un prix plus attractif ou par une fonctionnalité nouvelle. C’est la valeur que l’innovation crée, et c’est là que le bât de la transition énergétique blesse : on disposera des mêmes 220/380 Volts à 50 Hz  dans chaque maison ou chaque usine pour faire fonctionner les mêmes équipements, il n’y pas d’innovation en vue. La seule différence est que cela coutera plus cher car pour démonter ce qui existe et fonctionne il faudra réinvestir dans des technologies notablement plus chères. C’est une quadruple pénalité : amortissement perdu des centrales existantes; mobilisation de capital pour les énergies de substitution, y compris les réserves et stockages pour absorber les intermittences ; factures plus élevées pour le consommateur et le contribuable ; et contingentement en cas de sous-capacité car toutes les économies prévues ne seront pas réalisables. Nos meilleurs concurrents ne peuvent pas nous souhaiter de meilleures destructions de compétitivité.

À cela on oppose la création d’emplois dits verts et l’avènement d’une économie « clean tech » nouvelle. Ce que l’on oublie c’est les emplois qui seront éliminés par les fermetures connexes aux changements, et aussi le fait qu’il ne s’agit d’aucune nouvelle technologie créatrice de nouvelles richesses : passer au  solaire et à l’éolien ou développer l’hydraulique ne sont que des réaménagements de choses bien connues, tout au plus agrémentés de quelques défis d’organisation (« smart grid ») et de financement (subventions). Seule peut-être la chimie verte faisant intervenir des organismes génétiquement modifiés (plantes productrices de composés nouveaux, microbes digesteurs de la lignine et cellulose) pourrait être l’objet d’un vrai bond technologique. Le « clean tech » n’est rien d’autre qu’une expression à la mode pour désigner que ce que les technologies n’ont jamais cessé d’être : en développement,  mais cette fois avec certificats et blancs-seings à la clé. À contrario, produire des aliments, des montres, des pompes, des médicaments ou des ordinateurs n’est pas « dirty tech » que je sache !

C’est bien d’une révolution dont il s’agit : une mise en cause radicale du modèle actuel sans plan pour le futur autre qu’une déclaration dogmatique. Mais sans progrès à la clé.

C’est aussi une décadence car pour la première fois on se propose de régresser et d’augmenter artificiellement les difficultés économiques. Et cela on le sait à l’avance : ça c’est sans excuse.

Alors quels peuvent être les motifs animant ceux qui président à ces folies ?

Tout d’abord il y a les fameux lanceurs d’alertes : la Terre est en danger par la faute de l’Homme, il doit faire pénitence et se réformer. Hic et nunc ! Chacune de ces propositions est grossièrement fausse, mais cela n’est rien car grâce à une répétition incessante c’est devenu une vérité. Parmi ces lanceurs d’alerte il y a des scientifiques honnêtement préoccupés par certaines observations qu’ils font, mais il y a aussi des malins qui utilisent les publications scientifiques pour faire développer des modèles et des scenarii les plus ébouriffants qui impressionneront l’opinion ; cela s’appelle manipulation et désinformation.  Une étrange alliance s’est développée entre le monde scientifique, peu enclin à d’hypothétiques extrapolations, et le monde des faiseurs d’opinion qui confortent les scientifiques en leur conférant une importance inespérée. Le scientifique sincère est devenu l’idiot utile, compagnon de route du révolutionnaire vert. Et le scientifique militant – oxymoron devenu hélas réel – s’est vendu au diable de la manipulation d’opinion. Qui ose poser des questions ou émettre des doutes se met en danger car l’opprobre est immédiatement jeté sur celui ou celle qui divergerait de la ligne. La violence pas seulement verbale que l’on constate dans ce débat prouve qu’il n’est pas qu’intellectuel. Il y a là un parfum bolchévique.

Ensuite il y a l’opinion. Avec le relai de médias complaisants (ils ne le sont pas tous, mais tous sont plus ou moins atteints) les organisations gouvernementales nationales et supranationales, noyautées par les non-gouvernementales, fomentent l’agit-prop : il n’y a pas une semaine sans qu’une brève ou une annonce plus substantielle ne soit publiée pour animer la flamme et répéter les dogmes. Comme il est difficile de résister à un tel tir de barrage les partis politiques exercent le suivisme dont ils sont les champions. Comment sinon expliquer la politique d’un parti chrétien social suisse dont l’une des leader siège au Conseil fédéral et qui aide activement à tout mettre en place pour couper la branche sur laquelle elle est assise ou tisser la corde avec laquelle nous seront pendus ? La chancelière cherchant sa réélection dans le gros canton du nord fait la même chose, malgré ou à cause de son expérience de jeunesse en DDR.

Que l’on ne me rétorque pas que je souffre de phantasmes de type complotiste. Il n’y a pas besoin de stratégie cachée et d’organisation digne du Komintern pour qu’un idéal néo-soviétique n’apparaisse : que veulent donc dire des expressions comme autrement, indignez-vous, décision citoyenne sinon un appel à une forme de pouvoir politique différente des formes démocratiques et légales actuelles, dans laquelle les assemblées de la base sont ou bien anarchiques et stériles (c’est sympa) ou bien à la solde du comité central du parti de la pensée unique qui sanctionnera la ligne à suivre (c’est comme ça que ça marchera, en moins sympa). Il n’y a même pas besoin d’organisation secrète pour orchestrer cela, les conférences internationales sur le climat, la biodiversité, les risques industriels, etc. sont suffisamment fréquentées par les ONG dont les représentants siègent dans les comités et préparent les accords et communiqués finaux, en accord avec des stratégies qu’ils ne cachent pas. Contre cela peu de protestations se font entendre car de tels machins ont bien appris à faire la sourde oreille.

Le monde occidental est en décadence, est-ce avec point d’exclamation ou d’interrogation ? Lorsque dans des luttes pour le pouvoir ceux-là mêmes qui vont le perdre aident au processus de sa destruction il est fort probable qu’il s’agisse de la fin d’une époque. Ce sera à l’Asie, l’Afrique et l’Amérique latine de prendre le relai, là où les préoccupations sont plus de progrès que de déclin.

En parlant de continents : la masse glacière de l’Antarctique est en augmentation et personne ne sait vraiment pourquoi.


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