Les esprits tordus du journalisme.

C’était prévisible : qu’une initiative constitutionnelle soit rejetée par une majorité des cantons alors qu’elle obtient une majorité de suffrages remettrait en question l’exercice de la démocratie au prétexte que la volonté majoritaire aurait été blessée. Il en va de même pour l’élection d’un président américain par le biais de grands électeurs. Ce qui ne viendrait pas à l’idée d’un citoyen bien éduqué est une rengaine de journalistes tordus à force de se contorsionner lorsque ça gratte là où ça les dérange. Comme beaucoup de cacahuètes finissent par remplir de gros sacs, l’accumulation d’anecdotes significatives de leurs biais cognitifs permet de décrire une caractéristique générale et éthologique de cette profession, celle de jouer au bêta, ou l’être, pour suggérer des problèmes là où, bien au contraire, ils sont bien résolus.

Non, une initiative ne réunissant pas la majorité du peuple et celle des cantons ne devient pas loi. Par contre un référendum contre une loi déjà adoptée par le Parlement, Conseil national et Conseil des États (CE), n’a besoin que d’une simple majorité populaire pour que cette loi soit retoquée puisque le CE aura déjà exprimé la voix législative des cantons.

Le vote populaire n’est pas une mesure de vérité, de grandeur morale ou de raison raisonnante, c’est simplement un mode de décision. L’élu peut s’avérer inepte ou la réponse à une question référendaire inadéquate, cela ne se saura que plus tard, même assez vite lorsque du populisme aura influencé la prise de décision.

C’est parce qu’il est fédéral qu’un État aménage des modalités décisionnelles qui empêchent que les gros agglomérats populaires ne prévalent systématiquement sur les autres occupants du territoire, que le lion n’ait pas l’entier de sa part. C’est pourquoi un grand électeur américain ne représente que 193 000 habitants du Wyoming mais 763 000 au Texas. La surreprésentation des petits est aussi manifeste au Sénat, dont le CE suisse est le pendant. Le Bundesrat allemand est aussi composé de manière « inégale » alors que dans l’Union européenne le vote qualifié de l’Allemagne représente 2,85 millions de ses habitants alors que celui de Malte n’en représente que 133 000. L’UE a aussi une clause d’unanimité des États membres pour les décisions les plus importantes, ce qui donne à Malte la même force de nuisance que celle de l’Allemagne.

Ces prétendues inégalités en évitent de pires, celles de l’absolutisme. Un réseau d’institutions fédérales et de mécanismes destiné à éviter des polarisations excessives est certainement moins fragile qu’un régime majoritaire et monolithique, donc bien plus moderne que n’importe quelle autre solution. Traiter cela de vieux, de trop compliqué et d’injuste, donc d’obsolète, est une imbécilité chaque fois répétée par des ignorants ou des révolutionnaires manqués.

Et qui répète cela à chaque occasion sinon des esprits tordus ? 


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