Politique environnementale

L’instrumentalisation de la peur et les incantations utopiques doivent cesser afin que les politiques environnementales s’orientent exclusivement selon une gestion bien comprise du risque et des incertitudes.

Il faut distinguer les politiques environnementales des idéologies écologistes que prônent maintenant presque tous les partis politiques, même sans être en mesure de les expliquer. Une politique environnementale ne se construit pas sur des a priori, n’est pas animée par des émotions morales ou romantique et doit s’interdire d’appeler à l’utopie. Elle doit se fonder sur des faits établis ainsi que sur un principe simple : savoir que toute activité humaine ne peut se développer sans risques pour la santé ou pour l’environnement, risques qu’il est donc nécessaire d’appréhender et de tolérer.


Tolérer veut ici dire que le non souhaité, le pénible et le douloureux se manifestera sans qu’il soit nécessaire à chaque occurrence de remettre en cause un système qui en admet explicitement la réalité. Réduire les risques ne peut pas signifier leur élimination car ne pas les prendre entraîne aussi des conséquences non désirées, dont aussi l’exposition à d’autres risques.

Le plus mauvais service que les mouvements écologistes ont apporté à l’humanité a été de laisser croire que la Nature était bonne, qu’elle se trouvait en équilibre, et que les artifices inventés par l’Homme ne pouvaient que la détruire. Alors que l’entier de l’humanité vit plus longtemps, en meilleure santé et mieux d’année en année et de génération en génération, cette idéologie hait ces progrès car ils ne seraient pas durables et consommeraient des ressources non renouvelables.

Pourtant rien n’est en soi durable ni renouvelable, ce sont là deux concepts si relatifs que chacun s’en approprie sa dimension préférée. Il est vrai que, jusqu’au début de l’industrialisation, seuls les monuments funéraires ou autres triomphes avaient vocation à la durabilité ; tout le reste se renouvelait à haute fréquence, en particulier les courtes vies humaines. Désormais, notre espèce exploite la nature à son profit tout en devant veiller à ce que l’espace vital ne devienne morbide. Pour cela elle doit générer suffisamment de moyens économiques pour dépasser le stade de simple exploitant, car traiter les déchets, assainir les eaux et limiter les émanations polluantes et autres impacts néfastes à la santé et à l’environnement ne se fait jamais en situation de dénuement. N’étant ni décliniste ni eugéniste, je ne retiens pas comme solution sensée l’alternative de la décroissance ni celle d’une implosion démographique.

Par ailleurs, entretenir la vision d’une gestion globale des questions climatiques et environnementales est simultanément une illusion et un cauchemar. Dans l’accord de Paris, les COP suivantes, et même le denier G7 de Biarritz, c’est un Monde westphalien qui s’exprime, composé de nations représentant des intérêts souvent divergents, même et surtout sur ces questions. Cela restera ainsi jusqu’aux calendes grecques et s’imaginer que la Suisse devrait y prendre un rôle de leader technologique ou moral s’apparente au pharisaïsme.  Si des accords multilatéraux doivent être conclus, alors il faut qu’ils soient équilibrés et que la Suisse reste modeste sans faire aucune surenchère au titre de son opulence ou d’une prétendue autorité technologique. Une gouvernance globale offre des perspectives orwelliennes ; elle met aussi tous les œufs dans le même panier et rend probable la grosse et unique erreur globale alors que ce sont des multitudes de solutions qui doivent être développées, dont la plupart échoueront sans faire trop de dégâts. L’idéologie collectiviste n’est pas nouvelle, elle promeut une pensée unique, celle qui mène à toutes les dérives totalitaires.

Rôle du politique

Un antagonisme inévitable existe entre, d’une part, les buts de conservation et de protection de la santé et de l’environnement et, d’autre part, les activités productives de la société —agriculture, industrie et services, y compris les loisirs. Le rôle du politique n’est pas de satisfaire des demandes de tous ordres mais bien au contraire de faire des arbitrages qui ne doivent pas être systématiquement biaisés au prétexte d’une émotion ou d’un intérêt particulier. L’action présente des risques, tout comme l’inaction, la décision dépendra de l’évaluation des avantages et des inconvénients pour chacune des variantes. La régulation doit avoir le but de fixer un cadre jugé sûr, qui permette l’action tout en lui imposant des contraintes, mais qui ne l’étouffe pas. Les règles, normes et standards imposent des coûts à l’action qui peuvent même s’avérer insupportables, c’est pourquoi elles doivent être édictées avec mesure. 

Analyse Risque – Risque

Des experts sont nécessaires qui procèdent à ces évaluations, ils ont le seul droit à la probité et le devoir de bien distinguer ce qui tient du factuel, du probable vérifiable, ou du vaguement possible. Face aux incertitudes ils doivent aussi avoir l’honnêteté de reconnaître leur ignorance. En aucun cas un expert ne doit se transformer en avocat d’une cause, quelle qu’elle soit.

La gestion du risque est suffisamment bien maitrisée pour définir des normes stables qui permettent de se maintenir dans une enveloppe sure. C’est le rôle du politique d’avaliser ces normes et d’en assumer les conséquences. Une politique qui serait fondée sur des incitations (fiscales, subventions directes ou indirectes) ou des punitions (taxes) sera toujours empreinte d’illusions économiques, d’arbitraire et de favoritisme, que ce soit pour des raisons idéologiques ou simplement électorales. À part le financement de travaux de recherche, il n’est pas du rôle de l’État de dicter ni de financer les moyens pour atteindre les objectifs de qualité environnementale.

Face aux inévitables incertitudes, le politique doit effectuer des choix. Devant l’inconnu, il sera souvent tenté par l’emploi du principe de précaution. Celui-ci consiste à accompagner les nouveaux développements technologiques afin de veiller à ce que des débordements graves ne puissent pas avoir lieu. Au fur et à mesure qu’une nouvelle technologie apparaît, il est donc nécessaire d’évaluer en parallèle les impacts qu’elle peut avoir sur la santé et l’environnement et d’y pailler en conséquence. Cependant, en aucun cas l’application de ce principe ne doit consister en un bannissement pur et simple de toute nouveauté au titre du manque de connaissance ou même d’une vague inquiétude, ; ce risque zéro empêcherait tout progrès et ignorera toujours l’occasion perdue. La science ne peut jamais prouver une absence ou une innocuité. Pourtant, lorsque malgré des recherches bien étayées, des hypothèses ne se vérifient pas dans le cadre normal de l’activité (par exemple la nocivité des OGM ou des rayons non ionisants) alors il faut admettre que la sûreté n’est pas mise en cause et s’abstenir de réguler à tout prix.

Une politique environnementale qui se substituerait aux méthodes scientifiques doit être taxée de populiste, dans le plus mauvais sens du terme. Cela s’appelle écologisme, se prêche tant à gauche qu’à droite, et n’a rien à voir avec l’écologie qui n’est ni une politique ni une méthode, mais qui est une science devant rester dénuée d’affects et de pathos. Pourtant, en Suisse, comme dans la plupart des pays de l’OCDE, les partis politiques clament tous leur passion pour « l’écologie », une forme de révélation électorale. S’ils comprenaient et adhéraient aux points du dodécalogue encadré dans cet article, alors ils pourraient avoir mon vote. J’ai bien peur qu’aucun ne sera à la hauteur.

Thèmes environnementaux

Les grands thèmes actuels des politiques environnementales concernent les questions climatiques associées de manière plus ou moins intensive à une cause humaine, la gestion de déchets et pollutions de toutes sortes dans l’air, les eaux et les sols, l’aménagement du territoire, et la conservation de la biodiversité.  Comme c’est le climat qui est actuellement mobilisateurs, toutes les préoccupations environnementales ou sociétales y sont rattachées, ce qui est absurde et prétérite des priorités de plus grande importantes et urgence.

Politique climatique

Il est probable que ce titre soit un oxymore. Comment mener une politique à propos de quelque chose qui ne se laisse quasiment pas gérer ? S’imaginer qu’une seule grandeur, les émissions de gaz dits à effet de serre, puisse être la variable d’ajustement tient plus du mantra que d’une analyse sobre des forces en présences. Ce n’est ni honnête ni intelligent de faire des promesses de mise sous contrôle d’un climat qui aurait été dérèglé. Le but de limiter le réchauffement à +1,5 ou +2 °C n’est fondé que sur des sentiments ou des extrapolations les plus excessives, alors que les économistes estiment qu’un réchauffement de 3 °C pourrait entraîner à la fin de ce siècle des pertes de revenus de seulement 2 % avec une marge de ±2%, ce qui signifie que des bénéfices compensent les dégâts jusqu’à même les égaler. De son côté le GIEC, experts mandatés comme avocats d’une cause, parle de dépenser environ 3% du PIB mondial chaque année pour de longues années afin de « sauver le climat ». Les coûts seraient alors un gros multiple des dégâts que l’on désirerait éviter, sans d’ailleurs savoir si ces actions auront une quelconque efficacité. Les couteuses et trompeuses « transitions énergétiques » qui en découlent sont exactement les exemples à faire cesser au plus vite. Si sortir de la dépendance des carburants fossiles est à terme une nécessité, rien ne démontre que le faire en urgence au détriment de tout le reste soit une politique responsable. Taxer le carbone et favoriser des pratiques inefficaces et inefficientes s’associe au détournement de fonds. Les climats vont changer, entrainant avec eux des conséquence néfastes et bénéfiques ; la sagesse politique est de se donner un cadre permettant l’adaptation à des conditions changeantes et peu prévisibles.

Pollutions

Tous les déchets ne sont pas des polluants, mais toutes les substances ayant des effets nocifs pour la santé et l’environnement peuvent et doivent être maintenus en dessous d’un seuil critique dans les écosystèmes.

La vraie question est celle de ce seuil, avec en corollaire les moyens à engager afin de s’assurer qu’il ne soit pas dépassé. C’est pourquoi il est impératif de ne pas se laisser guider par la simple notion de danger, ingérable sauf par des promesses intenables.

La régulation de toutes les substances pouvant poser problème est devenue un monstre bureaucratique, nécessaire mais peu compréhensible. Dans une économie prospère comme celle de l’Europe et de la Suisse, les risques associés aux polluants de l’air et des eaux sont très bien maitrisés, ce que le monde politique a trop tendance à oublier. Des réactions épidermiques à des « annonces » de présence d’une substance dans l’environnement ne doit pas entraîner d’immédiates campagnes de mise en garde anxiogène et des bannissements.

Par exemple, alors que l’agriculture n’a pas cesser d’approvisionner une population mondiale qui a triplé depuis 1950 tout en utilisant des surfaces agricoles en stagnation, il lui est systématiquement reproché une utilisation trop intense d’engrais et de pesticides. L’agriculture bio est en partie née de cette inaptitude à tolérer une exposition à des substances qui pourtant sont parmi les mieux étudiées et les plus régulées au monde. Renoncer aux substances de synthèse n’améliorerait en rien la sûreté de l’alimentation et la qualité environnementale mais rendrait certainement plus précaire la sûreté de l’approvisionnement, tout en mobilisant des surfaces plus élevées. Il en va de même pour d’autres substances, les émanations de moteurs diesel par exemple ou les perturbateurs hormonaux, là où, encore et toujours, il faut se rendre compte que c’est la dose qui fait le poison, et non pas la simple détection.

Les normes pour les rejets à l’eau et à l’atmosphère sont strictes et le deviennent toujours plus au fur et à mesure que croît l’intolérance au plus minime risque. Les pollutions et décharges sauvages sont des restes du passé qu’il faut maintenant gérer, ce qu’une économie forte est capable de financer. De grands espoirs sont toujours attendus du recyclage et autres circuits dits vertueux parce que courts. Il existe pourtant cette loi inexorable par laquelle les efforts à fournir ne permettent que d’obtenir des gains et regains toujours diminuants. C’est pourquoi, ultimement, la dernière bonne utilisation des déchets est de les incinérer, permettant ainsi de récupérer encore un brin de chaleur.

Aménagement du territoire

Une des caractéristiques de la Suisse est que, à l’exception des cimes alpestres, tout son territoire est le fruit d’aménagements séculaires. Mise à part des horreurs architecturales dans des quartiers rébarbatifs de villes neurasthéniques ou dans des stations de ski valaisannes, nous admirons les paysages qui en résultent, y compris même ceux de grand lacs artificiels, témoins de l’esprit d’entreprise de nos prédécesseurs.

La conservation de la nature et de sa biodiversité est nécessaire car il s’agit d’un patrimoine qui ne se renouvelle par lui-même que si des espaces lui sont réservés. C’est pourquoi des zones entières doivent être protégées, jusqu’à l’absence totale de l’intervention humaine directe comme dans le Parc National. Cependant il n’est ni nécessaire ni possible de maximiser la biodiversité partout et à tout prix, il suffit de disposer de réservoirs vivaces afin que les espèces puissent être conservées en s’y reproduisant.

Le collapse n’est pas pour demain, n’en déplaise aux habituels annonciateurs de malheurs exponentiels. Depuis plus d’un demi-siècle il est démontré qu’une gestion raisonnée de l’environnement est possible, Cela demande des moyens que seule une économie en bonne santé pourra continuer de fournir. La qualité de vie en Suisse est parmi les meilleures au Monde, bien que nos magnifiques paysages soient artificiels à plus de 75%. Les générations futures sauront aussi s’en occuper et en jouir.

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Note additionnelle :
En ces matières de sûreté des gens et de l’environnement, les discours courts sont généralement alarmistes, chargés d’allusions mensongères. Un discours rassurant est d’ailleurs vite réprimé au prétexte de sa naïveté. Il faut alors développer les sujets et fournir des explications plus détaillées qui, hélas, seront considérées indigestes.
Le lecteur bienveillant et néanmoins attentif pourra trouver plus de ces explications dans deux essais commis par l’auteur :

  • Réarmer la raison. De l’écologie raisonnée à la politique raisonnable, 2017
    Présentation :  bit.ly/réarmerraison, en vente en ligne sur Amazon.
  • Entre hystérie et négligence climatique. Du totalitarisme au réalisme, 2019
    Une critique détaillée de l’alarmisme actuel.
    Présentation : bit.ly/hystérieclimatique , en vente directe auprès de l’auteur

 


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