Faut-il imposer un but à la nature ? Non !

Les espèces n’évoluent pas dans un quelconque but. Comme dirait Johnny : « elles évoluent …parce qu’elles changent. »

On sait que les girafes n’ont pas développé un long cou pour arriver à brouter le haut des arbres, ni que les insectes ne se mirent à fabriquer des phéromones dans le but d’attirer un partenaire sexuel. Ces fonctions sont apparues et se sont avérées supérieures en comparaison avec les alternatives précédentes, ce qui a permis à l’espèce de mieux survivre, alors que bien d’autres se sont éteintes. Au fil des générations les avantages comparatifs se perpétuent et se renforcent alors que les débilités s’atténuent et finissent par disparaitre. Aucune espèce ne sort parfaite d’un tel processus heuristique, elle est simplement la mieux, ou la moins mal, adaptée à son environnement.

Je prétends que ni les écolos ni les religions n’aiment vraiment ça.

Pour les religions, surtout pour les monothéismes, cette réaction est assez compréhensible car le dessein de leur Dieu y est mis en question. Sans s’opposer directement aux théories de l’évolution (sauf les créationnistes) elles ont de la peine à accepter ce hasard qui serait à l’origine des changements. On ne discutera pas ce problème métaphysique car il est par essence indiscutable.

Quant aux écolos ils vont protester et contester mon affirmation car en grande majorité ils acceptent la théorie darwinienne. Mais ils disjonctent entre leur reconnaissance de théories scientifiques jusqu’ici non réfutées et leurs désirs de figer la nature dans un état qui serait optimal à leurs yeux. Cette « téléologie humaine » est d’ailleurs le fonds de leur commerce.

Prenons deux exemples : pour les écolos toute réduction de l’habitat d’une espèce est une perte inconsolable, il faut donc non seulement établir des zones de conservation mais s’opposer à toute activité humaine qui pourrait restreindre l’étendue et la profondeur de la biodiversité. Un mètre carré de champ cultivé intensément ou de surface bétonnée est une atteinte grave à l’équilibre naturel auquel il faudrait aspirer. Un quelconque changement du climat est intolérable, surtout si ce sont les flatulences industrielles qui le provoqueraient alors que ce serait merveilleux si c’était pire, mais par des causes naturelles. Dans les deux cas il faut à tout prix rétablir une situation que nous les hommes aurions dégradée. Il y a une cause finale (telos) qui doit être respectée, celle d’une nature bonne en soi et équilibrée. Ce type de position est tout autant irréfutable que la révélation religieuse ; à part l’ironie rien n’y fait.

Les promesses des religions concernent l’au-delà, au nom duquel une morale d’ici-bas est décrétée. Les apostats n’y sont pas bien vus, peut-être tolérés mais parfois condamnés à mort s’ils persistent.

Les écolos sont encore plus exigeants : le paradis doit se faire ici et maintenant, même s’ils sont incapables de spécifier la nature à laquelle ils aspirent ; quel climat, quelle degré de diversité biologique désirent-ils ? Leur morale devient vite totalitaire car à leurs yeux ne pas accéder à leurs exigences serait un crime immédiat contre la Nature, l’humanité et les générations futures d’Homo sapiens sapiens ou de Bacillus anthracis, sans rédemption possible.

Quant à moi, sachant que je ne sais pas grand-chose et me gardant de prescrire des traitements inutiles ou nuisibles, je préfère m’émerveiller de la nature telle qu’elle est plutôt que telle qu’elle devrait être au nom d’une idéologie de zinzin.


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