D’énergiques jérémiades n’offrent pas de solutions

J’observe que tout le monde se rend compte de ce dont il ne fallait pas se rendre compte il y a une année seulement.

Pour ma part, avec le Think Tank Carnot-Cournot-Netzwerk, je peux bien dire « je vous l’avais bien dit ».

Pour d’autres, il suffit de blâmer les dirigeants qui dirigeaient sans direction et de relever les incuries passées.

Mais de telles jérémiades ne servent à rien car ceux qui les prononcent ne suggèrent pas de solutions.

Une Conseillère fédérale chargée de l’énergie et de l’environnement est maintenant en situation de gestion d’une crise qu’elle n’a eu de cesse d’instituer. C’est absurde ! Comment comprendrait-elle quoi que ce soit à ce qu’elle n’a pas voulu entendre ni apprendre, tout comme celle qui l’a précédée. Ses départements sont peuplés d’apparatchiks sélectionnés au cours de deux décennies pour leur pensée magique et dont le narratif est maintenant débusqué mais qui sont incompétents pour corriger le tir et passer à l’action. Le secteur de l’énergie est à l’avenant, jouissant de confortables prébendes et inapte à la tempête. 

Donc a) il faut changer de garde et Mme Sommaruga ne doit surtout pas en être chargée.

Cependant, la crise est réelle avec un potentiel économique grave pour notre pays et pour le continent européen. Il n’en va pas de même aux USA, là où l’autosuffisance est encore assurée pour longtemps et l’approvisionnement énergétique n’est qu’une question de microéconomie et de luttes partisanes. Le reste du monde se réjouit des déboires du vieux continent et sait mieux que lui comment affronter l’adversité.

Après la fermeture de la centrale nucléaire de Mühleberg, la Suisse doit importer encore plus de courant électrique qu’auparavant, en hiver. Elle ne dispose pas de réserves de gaz sur son territoire et ses stocks de produits pétroliers sont limités. Seules les réserves de matière fissiles sont abondantes, qu’il faudrait vite acheminer et stocker dans le pays avant que d’autres ne les confisquent. Ses voisins ne sont plus en mesure d’exporter grand-chose. Les contrats d’approvisionnement voient leurs durées raccourcir et leurs prix se multiplier.

Mais surtout, ce sont les quantités qui ne sont pas disponibles ni à court, ni à moyen, ni à long terme ; c’est là le plus grand danger pour notre économie et notre bien-être.

On pourrait acheter du pétrole type « Oural » au prix cassé de 87 US$/bbl, en passant par les raffineries indiennes, mais cela semble une stratégie trop chinoisée pour un Conseil fédéral qui siège à Berne.

On pourrait faire installer un dock supplémentaire à un terminal LNG, à La Spezia ou à Fos-sur-Mer, et s’en faire livrer par l’Algérie, l’Angola, ou le Qatar, mais cela heurterait l’obsession anti-carbone des apparatchiks qui ont été sélectionnés pour porter cette idéologie. On pourrait aussi lever les sanctions contreproductives envers la Russie, contourner celles infligées à l’Iran, mais…

On pourrait mettre en planification intensive la construction de deux EPR nucléaires de 1,6 GW chacun (la technologie chinoise est au point, le prix abordable) et prévoir une troisième pour plus tard. Mais, au prétexte que cela prendrait du temps pour lever les interdits légaux et obtenir les permis de construire, on n’essaie même pas de commencer.

À ces « on pourrait » s’opposent trop de « mais » alors que ce sont des « just do it » dont il fait besoin. Des solutions existent, plus ou moins farfelues, osées et en tout cas très coûteuses. Pour les choisir et les mettre en œuvre, il faut des esprits déterminés qui transformeront ce « on pourrait » en « on doit », puis rapidement en « on se met à faire ». 

Donc b) Il faut changer de garde et Mme Sommaruga doit se retirer.


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5 thoughts on “D’énergiques jérémiades n’offrent pas de solutions”

  1. Si seulement de remplacer Mme Sommaruga ou même le Conseil fédéral suffisait !
    À la tête des entreprises nous avons un problème du même ordre, sans parler de la direction des partis.
    C’est une reconquête des esprits de nos concitoyens qu’il faudrait entreprendre avant de pouvoir lancer des projets pour améliorer notre garantie d’approvisionnement. Cela prend du temps…
    À moins que la pénurie soit suffisamment douloureuse et alors cela pourrait aller plus vite ☺️
    Néanmoins à court terme, il n’y a pas de solution bon marché et évidente.

    1. Bien sûr que du côté entreprise il y a beaucoup à faire. Vous aurez noté mes piques envers l’administration et les sociétés du secteur (principalement électrique et gazier, les pétroliers sont plutôt un cartel non industriel). Dans le reste de l’économie, les grosses et moyennes entreprises ont d’autres horizons que l’étroite Suisse, et les petites sont sans voix ni pouvoir.

  2. bien vu; exactement cela; pas de courage, pas de vision; juste la pensée magique pour se faire bien voir; il y a longtemps que je pense que Madame Sommaruga ferait mieux de reprendre le piano: mais qui à sa place

  3. On tomberait de Charybde en Scylla, soit avec a) soit avec b), c-à-d. que le nouvel élu au CF pourrait être Roger Nordmann, « spécialiste reconnu en matière d’énergie », ou « Monsieur solaire », selon la presse main stream. Dans le Parlement tout le monde le prendra pour le sauveur…
    Mais il ne sait pas lui-même ce que ses 44 TWh en PV représentent — selon son livre « Le plan solaire et climat », au sous-titre quasi magique « Comment passer de 2 à 50 GW pour remplacer le nucléaire, électrifier la mobilité et assainir les bâtiments » —, objectif prévu pour 2050, représentant 250 km2 de modules PV. Cela implique aussi de devoir mettre en service chaque jour, tous les jours, jusqu’en 2050, pas moins de 4,88 MW ou 24’400 m2 de modules PV, soit aussi 489 installations domestiques de 50 m2, je dis bien chaque jour non stop. On s’apercevra, trop tard bien sûr, que le roi est nu !

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