Au nom de la science je vous dézingue

Un livre vient de paraître[1] dont je me demande si je devrais l’acheter et le lire. Il s’agit d’un pamphlet écrit par deux journalistes scientifiques(sic) du journal Le Monde et un sociologue qui désignent les industries comme marchands de doute et prétendent dévoiler leurs stratégies de manipulation “pour promouvoir leur « bonne » science et s’emparer du marché de l’information.” Les médias les plus officiels glorifient cet ouvrage, les plus critiques le vilipendent et répliquent vertement. Alors j’ai pris vingt minutes de mon temps pour écouter une présentation faite sur France Inter[2].  Cela m’a suffi, je ne dépenserai pas un de mes précieux sous pour lire ce livre.

Pourquoi cet obscurantisme de ma part ? parce que je me dois d’être économe, pas seulement de mes sous, mais de mon temps et de mes nerfs qui tous sont des ressources limitées. Ensuite parce qu’entrer dans ce jeu précipiterait l’envie de répliquer, ce qui m’exposerait au principe de Brandolini et me ferait argumenter trop longuement et en substance (comme le font certains[3]) alors qu’en fait il ne s’agit pas de discuter de la substance et que cela ne serait qu’une guéguerre qui n’intéresse personne.

Comment prétendre savoir ça en investissant si peu d’attention à ce sujet particulier ? parce que ce n’est pas le premier coup de ces thuriféraires d’un postmodernisme forcené et illibéral, accusateurs publics de ce qui n’est pas conforme à leurs idées. Ils disposent hélas d’une puissante plateforme – un lobby de plus – pour le faire, ce qui n’est pas mon cas.

Il faut pourtant reconnaître que les vingt minutes de cet entretien sont du grand art !

La journaliste Sonia Devillers ne sert pas seulement les plats aux journalistes Stéphane Foucart et Stéphane Horel, elle les pimente de sa persuasion. Si vous désirez sentir de la nauséabonde malhonnêteté intellectuelle écoutez-les, car le sens auditif a un effet immédiat sur l’olfactif, à en dégobiller. La connivence est si complète qu’il faut avoir un esprit aussi tordu que le mien pour se rendre compte que l’on se fait embarquer dans le convenu bien-pensant et relativiste.

Pour ces Stéphane n’importe quelle personne qui ne partagerait pas leur opinion ne peut être qu’un vendu ou un décérébré par des influenceurs au service de sombres intérêts. Car tous les intérêts sont sombres, sauf les leurs bien entendu.

Donc par exemple, parler de gestion de risques à tolérer en les distinguant du concept de simple danger serait une idéologie de droite propagée par des lobbies capitalistes. C’est si con que c’en est malhonnête, une telle habitude chez eux qu’il leur est impossible de supposer et de tolérer l’idée de la probité de ceux qui ne sont pas d’accord et utilisent des arguments rationnels. Comme le disait Céline ils puisent très au fond d’eux-mêmes pour parler ainsi de leurs congénères (mais comme c’est l’affreux Céline qui le disait c’est à ignorer).
Avoir tort ne fait pas partie de leur potentialité.

Se croyant malins, en soulignant que le recours à la science officielle serait le fait de lobbies mal intentionnés, ils oublient que ce serait donc aussi le cas pour Greta Thunberg et autres trolls de l’activisme écolo-climatique. Un seul moment où un peu de raison fait surface arrive lorsqu’il est dit que les compétences scientifiques ne sont pas très répandues et que la vérité en la matière peut être manipulable.

En voici un exemple devant leur propre porte : racontant l’épisode de l’émission de la gouvernementale France 2 sur le glyphosate[4] il ne peut pas leur venir à l’idée que les réactions négatives dont ils dénoncent l’immédiateté, l’abondance et la virulence étaient a) factuellement correcte, et b) nécessaires face à une entreprise manifeste de désinformation fondée sur des données foireuses et sans qualité scientifique. Car ces gens-là sont persuadés d’être « du bon côté », tout comme cette Élise Lucet d’ailleurs dont c’est la profession. Je m’arrête là, l’anti-glyphosatisme étant devenu une pathologie mystique qu’il ne faut pas attiser.

Espérer un débat n’a pas de sens car de tels journalistes se posent en arbitre, et l’arbitre a toujours raison, mais seulement dans une partie où l’on s’est mis d’accord sur sa personnalité.
En ce cas les arbitres sont partisans, incompétents, des salauds de la postmodernité.


[1] « Les gardiens de la raison. Enquête sur la désinformation scientifique », par Stéphane Foucart, Stéphane Horel, Sylvain Laurens. La Découverte 2020.

[2] France Inter, jeudi 24 septembre 2020, par Sonia Devillers avec Stéphane Foucart et Stéphane Horel.

[3] Des journalistes du « Monde » et un sociologue attaquent Jean Bricmont dans un livre : il répond

Les naufrageurs de la raison (et de la gauche) : réponse à Foucart, Horel et Laurens par Laurent Dauré

   http://www.scilogs.fr/ramus-meninges/les-champions-de-lintox/ par Franck Ramus

[4] Envoyé spécial « Glyphosate : comment s’en sortir ? » présenté par Élise Lucet
diffusé le jeudi 17.01.19 à 21h07, 118 min. Pas accessible en Suisse sans VPN, heureusement, ça ne polluera pas mes concitoyens.


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