La connerie : comment y réagir ?

Un jeune informaticien italo-américain a postulé que le bullshit[1] était asymétrique, c’est-à-dire que l’énergie pour le réfuter était un ordre de grandeur plus grande que celle qui est nécessaire pour le produire. Avant d’en traiter, je me permets un léger amendement à cette loi en passant du singulier au pluriel : des ordres de grandeur.

Cette asymétrie est bien connue où, aux affirmations simplistes, attribut essentiel de la connerie, les contre-arguments se doivent d’être nécessairement élaborés, détaillés, nuancés, complets, pédagogiques, c’est-à-dire parfaitement emmernuyeux, au point que la beuse initiale reste préférée à sa dissection ultérieure.

Produire une beuse peut être volontaire, on parle alors de baratin ou de mensonge, ou involontaire, c’est l’imbécilité ingénue. Elle peut rester isolée ou être servie en salve, au point de saturer un champ et ses alentours de ses excès nitriques et sulfureux, on parlera alors de pollution des esprits.

Les exemples ne manquent pas, parmi les plus gros : l’avenir radieux en général, la durabilité, les propos racistes, l’empreinte carbone, la malfaisance innée du métèque, le genre sans hormones, la gratuité, la nuisance absolue de la chimie, les bienfaits absolus du bio, le malheur de l’économie et les vertus de l’écologie, la sagesse et la bienveillance de l’État, le droit à la connerie, la prétention à sauver la Nature, et j’en passe. Et souvenons-nous que le dire n’est pas le pire, il y en a même qui y croient. Une chose est sure : ça nous pompe l’air.

Faut-il réagir ? nécessairement oui, sinon la connerie devient bulle papale, irréfutable. Mais alors : comment réagir ? On sait que disposer de faits avérés et d’arguments rationnels est indispensable, mais que les servir et resservir n’est pas seulement fastidieux mais contreproductif car cela n’ouvre pas l’entendement du con de service, ça rebute le vulgum pecus, vous pose en incorrigible pédant et vous fait mettre à l’index.

Alors peut-être vaut-il mieux provoquer en traitant la beuse comme telle et en le faisant savoir, attribuant ainsi la charge de la preuve de ce qu’il raconte à son producteur. Voici un petit outil pratique pour répondre succinctement à une attaque merdique : un tampon facile à appliquer dans un courriel ou autre document que l’on complétera par un lien hypertexte qui fera apparaître un texte quadrilingue de la loi de Brandolini. Le voici à votre disposition, en plusieurs dimensions :

   

Lien hypertexte à y ajouter : http://bit.ly/Loi-de-Brandolini

Remarquez le champignon croissant sur la beuse (panéole coprophile ?), réputé toxique et pouvant contenir des substances psychotropes, une synergie néfaste.

Utilisez cet outil à profusion ! D’une part cela aidera vos correspondants à comprendre qu’il ne vaut pas la peine de se mettre à argumenter sur tout et n’importe quoi, d’autant plus qu’être véhémentement d’accord entre soi ne mène à pas grand-chose. D’autre part, vous vous épargnerez beaucoup de temps en vous évitant d’entrer inutilement en matière ; et surtout ça vous calmera les nerfs, ce qui n’est pas rien.

[1] Bullshit, cowshit, bollock, crap, nonsense, beuse, bouse, connerie, ineptie, stupidité, bobard, absurdité, foutaise, baratin, Bockmist, Quatsch, Blödsinn, estupidez, tontería, bobada, gilipollez, etc. Ne pas compter sur l’élégance pour en faire sentir l’immondice.


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