L’impossible communication.

(sorry! no English translation yet available.)

La rhétorique devrait nous aider à bien communiquer sur les sujets les plus complexes.
Mais elle ne fait qu’entre ouvrir la perception de l’auditeur qui, elle ou lui, sélectionne ce qui est lui est audible de ce qui ne l’est pas.
Par ailleurs il y a des formes d’expressions horribles, illogiques, mal présentées et au contenu douteux qui, sans encombre, sont acceptées par de larges audiences.

Il y a là un paradoxe qui fait que souvent, et heureusement pas toujours, les propos les plus vides et dénués de sens sont ceux qui portent.
On comprend pourquoi les discours politiques se réduisent au simplisme primaire, à une propagande de vitupérations et de slogans, à la démagogie.
Trop souvent le mauvais goût est le prix de l’efficacité.

L’enseignant nous a pourtant appris à apprendre.
À tous sa pédagogie a permis d’accéder au meilleur de la connaissance.
Mais une fois l’élève devenu adulte le pédagogue n’est plus écouté, ou alors d’une oreille distraite.
L’enfant sait qu’il est ignorant, l’adulte ne veut plus le savoir.
À ce stade celui qui veut encore apprendre doit y montrer de la volonté alors qu’à l’école l’ordre et la discipline imposés par le « système » suffisaient.

Sur n’importe quelle question l’individu se forge une opinion en utilisant les outils qu’il a acquis, traditions bien transmises, adhésion aux vues de personnes de référence, ou alors par l’étude et le raisonnement.
Pour les grands et éternels thèmes d’ordre métaphysiques et religieux cela ne lui présente pas de difficulté majeure car il a grandi et vit dans une culture qui lui donne des repères.
Ce n’est pas le cas des questions nouvelles, liées à des connaissances nouvelles, en particulier les sciences et les technologies. Car ces connaissances ne sont ni simples ni faciles à engranger.
On doit alors ou bien étudier soi-même le sujet en utilisant tous les ressorts de son intelligence, ou alors il faut accepter l’avis des experts, sans savoir vraiment distinguer l’expert du charlatan. Pourtant la distinction n’est pas si difficile à faire : le vrai expert explique et présente sa méthode et ses arguments, le charlatan et l’idéologue se contentent d’affirmer.

C’est l’amère ironie de la communication : la tâche du charlatan est plus facile que celle de l’honnête homme.

 

connaissance-communicabiliteLes exemples ne manquent pas j’en choisirai deux dans des domaines qui me préoccupent.

La protection de l’environnement.

Le message simple, donc trop charlatanesque, est que nous, les humains, nous empoisonnons et abimons la nature qui doit être préservée. Les exemples ne manquent pas qui attisent des scandales.

Le message compliqué est que … ça n’est pas si simple.

Il faut mettre en perspective les progrès accomplis, tels qu’amélioration de la santé et de la durée de vie, la dépollution rendue possible grâce au progrès économique et technique (eh oui, jamais je n’ai vu de sociétés pauvres se préoccuper de dépollution).
Il faut commencer à argumenter, différencier l’évitable de l’inévitable, définir des seuils d’acceptabilité, avoir les moyens de ses prétentions, et se mettre d’accord sur des objectifs en soi contradictoires : développement à tout va contre protection à tout crin.
Faire des arbitrages et des compromis pour une impossible et improbable optimalisation.

Ces messages de complication sont donc inaudibles pour ceux qui ont pris l’habitude de gober la publicité et les séquences de quinze à trente secondes des journaux télévisés.

Le climat

On sait que des variations météorologiques se succèdent saisons après saisons, même si on ne se souvient pas du temps qu’il faisait l’an passé. Les sept années de famine et les sept années d’abondance décrites dans la Genèse ne sont pas des observations faites avec des satellites mais elles sont idoines.
Et on sait aussi que les climats ont changé, avec des glaciations successives, et qu’ils continuent de varier.
Sachant ou non tout cela, l’observation d’une hausse de la température d’environ un degré centigrade depuis un ou deux siècles faire craindre des conséquences pénibles pour notre habitat et nos conditions de vie.

Un message simpliste à l’extrême s’est imposé depuis maintenant plus de trente ans: par ses émissions de gaz dits à effet dit de serre l’homme est le principal responsable d’une catastrophe climatique imminente qui ne pourra être évitée que par la cessation de la combustion de carburants fossiles.
Ce message n’a pas changé malgré une masse de recherches et de modélisations qui ont pourtant plus contribué à semer le doute qu’à confirmer cette hypothèse anthropogénique.
Mais fidèlement et régulièrement les « experts » désignés dès 1988 pour confirmer l’hypothèse … la confirment.

En fait les rapports les plus étoffés, les modèles les plus sophistiqués, les études les plus détaillées ne répondent jamais à la question : quelles sont les causes des variations climatiques ?
Comment est-on entré puis sorti de la petite ère glaciaire (entre 1300 et 1800) et d’épisodes antérieurs similaires ?
Pourquoi les glaciers ont-ils commencé à fondre et le niveau de la mer à monter avant que l’on ne brûle de grandes quantités de charbon, de pétrole et de gaz ?
Comment les observations que l’on fait s’inscrivent-elles dans des cycles à plus long terme ?
Pourquoi le GIEC décrète-t-il mensongèrement que la sensibilité du climat est de 1,5 à 4,5 degré de réchauffement pour un doublement de la concentration atmosphérique du gaz carbonique alors qu’un calcul rigoureux de bilan énergétique ne donne que 0,4 à 0,8 °C ?

La mobilisation est devenue planétaire alors que ces questions restent non seulement sans réponses, mais non abordées, car elles dérangent et mettent sérieusement en doute le message simpliste.

Pour expliquer tout cela il faut s’en mêler, avec le risque de s’y emmêler.
Cette communication-là est compliquée.
Celui qui s’y engage se fait immédiatement descendre en flamme s’il est un personnage public (p.ex. Claude Allègre, Lord Lawson), ou ignorer s’il n’a pas atteint de notoriété.
N’ayant pas de célébrité pour me faire déguiller je connais pour ma part très bien le sort de l’ignoré. Cela en soi n’a aucune importance, sauf que le quidam reste désinformé.
N’ayant en général ni le temps ni l’intérêt de se plonger dans l’étude il accepte benoitement le message simple rabâché à l’envi par tous les activistes et les médias qui les soutiennent, il finit même par y croire.
Le mois le plus chaux de tous le temps, l’ours blanc perdu sur la banquise, les inondations de zones qui n’auraient jamais dues être constructibles : tout cela est évidemment et sans discernement expliqué par le réchauffement climatique causé par l’homme. Une photo, une petite phrase, une malheureuse victime suffisent, vouloir démontrer l’inanité de ces raccourcis demande trop d’effort, de temps, de place, d’attention.
Les savants sont ou bien pris en otages dans des pseudo-consensus scientifiques (un oxymore), ou alors ils se transforment en gourous prescripteurs des politiques à suivre impérativement. C’est la nouvelle trahison des clercs.

Dans un monde post-moderne l’arme de la communication est devenue essentielle. Avant, l’excommunication suffisait.
Mais ce combat est asymétrique : le simplisme, faux par nature, sort gagnant car plus aisé à saisir.
La raison, souvent difficile à suivre et ennuyeuse, demande trop d’effort, rend le débat trop compliqué, est le fait d’arrogants intellectuels qui prennent la tête des « vrais gens » ; elle reste donc inaudible.

Ma conclusion est pessimiste : pour rendre la raison à nos dirigeants et à nos concitoyens faudrait-il malheureusement utiliser les mêmes armes que les démagogues ? Devient-il inévitable de transformer le débat en un combat, d’user de tactiques de désinformation, de dissimulation et de mise au pilori, de s’attaquer aux personnes plutôt qu’aux idées ? Je crains que cela ne soit devenu nécessaire.

Je ne sais pas l’art d’être clair pour qui ne veut pas être attentif.
Jean-Jacques Rousseau
Du contrat social


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