Tout changer et tout garder en son état : est-ce possible ?

(No English translation)

Un des avantages de la démocratie semi-directe pratiquée en Suisse est que les citoyens peuvent non seulement réagir à l’action des politiciens mais aussi proposer des changements.

L’esprit humain est volontaire, orienté vers l’action, en tous cas pour les animaux alphas. Mais il oublie trop volontiers que chaque action est accompagnée de réaction et que, si l’on désire agir avec esprit de responsabilité, c’est l’ensemble du système qui doit être considéré. C’est ainsi que les conséquences néfastes et indésirées des initiatives populaires et autres actions politiques sont trop souvent ignorées.

Souvent une proposition faite sous forme d’initiative constitutionnelle implique un changement significatif des équilibres sociaux ou économiques au-delà de l’objet sur lequel le vote aura lieu. En voici quelques exemples.

L’initiative dite écopop selon laquelle l’augmentation annuelle de la population due à l’immigration ne devrait pas dépasser le 0.2% du nombre de résidents du pays. Une telle initiative poursuit des buts variés et ce n’est pas mon propos ici de les discuter. Mais elle part du principe que la Suisse est économiquement en bonne santé, et que cela va durer sans que l’application des mesures proposées n’y change rien.

L’initiative pour un revenu de base inconditionnel. Ici on propose de distribuer a priori et à tous un revenu fixe qui, aujourd’hui, ponctionnerait environ un tiers de la richesse créée dans le pays. Les initiants font comme si cette création de richesse restera en son état si telle initiative était acceptée.

L’initiative sur les résidences secondaires est une exception : dans ce cas les conséquences plus que néfastes pour l’industrie de la construction et les services dans les zones touristiques ont été froidement prises en compte par les initiants, bien qu’ils ne l’aient pas dit trop clairement pendant leur campagne.

La transition énergétique, que par oukase fédéral il nous faudra déglutir, est aussi de cet acabit, mais cette fois sans même consulter le peuple, le paquet étant saucissonné en un fouillis législatif impossible à démêler. Je ferai un procès d’intention à la Conseillère fédérale en charge de ce dossier qui, à dessein et de moins en moins charmante, lui a donné la forme d’un bloc soviétique.

On veut ici se passer de l’énergie nucléaire, faire des économies d’énergie, installer des sources alternatives intermittentes, réformer un réseau dit malin, et réduire les émissions de gaz carbonique. Ici encore je n’entre pas dans la discussion de ces propositions, chacune à peu près aussi mal fondée que les autres, mais je note que le coût de l’énergie sera ainsi artificiellement et sérieusement augmenté (voir mon billet sur les énergies intermittentes). Il faudra surinvestir massivement, percevoir des taxes plus élevés pour payer les flots de subventions prévues, et payer un prix du KWh multiple de celui d’aujourd’hui pour que le consommateur reçoive les mêmes 220/380V sous 50Hz à sa prise électrique (ou peut-être avec des restrictions), et ce sans effet aucun sur le bien ou le mal de la planète (voir mon site climate.mr-int.ch). Ça c’est sûr et certain. Ce qui l’est moins c’est la capacité que notre pays aura de conserver et développer une industrie productive, déjà en déclin. La compétitivité dépend aussi des coûts de production et de la fiscalité directe et indirecte. Mais on suppose que toute cette économie fleurira comme avant, voire même s’améliorera par les technologies vertes qui seraient développées. C’est d’une part méconnaitre l’essence de ce qu’est un progrès (dans ce cas il est nul donc sans valeur, voir mon billet à ce sujet), et d’autre part ignorer la volatilité des décisions économiques que les entreprises sont amenées à prendre lorsque les conditions cadres sont meilleures ailleurs.


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